Réponse du collectif « Jamais Sans Toit » à la députée du Rhône #annebrugnera

Sur le plateau de BFM Lyon jeudi 6 octobre 2022, Mme Anne Brugnera, en répondant à une question d'un journaliste, expliquait que « ce sont les associations qui font du buzz autour du sujet. »  en faisant référence à l'action du collectif "Jamais Sans Toit". Ce dernier tenait à réagir.

Madame,

 

Nous tenons à faire valoir notre droit de réponse quant aux propos que vous avez tenus au sujet de l’action du collectif « Jamais Sans Toit » sur le plateau de BFM Lyon jeudi 6 octobre 2022. 

 

En effet, interrogée par un journaliste sur la question des enfants sans toit au sein de la Métropole Lyonnaise, vous expliquez qu’en vérité « ce sont les associations qui font du buzz autour du sujet. » 

Le buzz, onomatopée anglaise évoquant le bourdonnement des abeilles, désigne une technique de marketing qui cherche à faire parler de soi... ou à lancer des rumeurs. Expression pour le moins surprenante quand il s’agit ici d’évoquer l’action quotidienne de centaines de citoyennes et de citoyens qui œuvrent bénévolement et anonymement afin de venir en aide à ces enfants et à leurs familles.

 

Ainsi nous faisons du « buzz » quand à chaque rentrée depuis bientôt dix ans, nous poussons ce cri d’alarme pour alerter sur la situation de centaines d’enfants qui endurent des conditions de vie indignes et incompatibles avec le suivi d’une scolarité et qui méritent la protection des autorités parce que leurs droits élémentaires sont bafoués.

 

Du « buzz » quand nous rendons visible cette situation insupportable trop souvent dérobée au regard du reste de la population en organisant rassemblements, manifestations, interpellation des élus, pétitions, happenings, etc.

 

Encore du « buzz » quand nous préparons des goûters solidaires à la sortie des classes pour financer des nuitées d’hôtel à des familles sans toit (35 000 euros récoltés en 2022) parce que la générosité citoyenne pallie encore et toujours les défaillances des autorités et se substitue au principe de solidarité nationale.

 

Toujours du « buzz » lorsqu'à l'été 2017 nous nous indignions de voir que le maire de la troisième ville de France - dont vous étiez l’adjointe à l’Éducation et à la Petite Enfance - avait fait couper l’eau dans un jardin public pour en chasser les sans-abris qui s’y étaient réfugiés, ou qu'il avait dépêché à de nombreuses reprises la police municipale pour empêcher une mise à l’abri dans les écoles, et ainsi tenter de décourager tout geste de solidarité.

Tant que l’État, dont c’est la mission, se montrera incapable de faire respecter les deux principes intangibles que sont l’inconditionnalité et la continuité de l’hébergement d’urgence tels qu’ils sont inscrits dans la loi, nous continuerons d’alerter, ou si vous préférez, de bourdonner, et d’accueillir des élèves et leurs familles la nuit dans les locaux scolaires.

Depuis 2014, près de 500 enfants ont été mis à l’abri temporairement dans une centaine d’établissements, le temps que la Préfecture leur assure une place d’hébergement, comme la loi l’y oblige. 

Pour reprendre les propos tenus en mai 2019 par M. Guy Corazzol, à l’époque adjoint au Maire de Lyon, délégué à l’Éducation à propos de l’occupation de l’école Léon Jouhaux, l’école est un « sanctuaire » ; mais c’est bien dans le sens d’un espace préservé de la brutalité du monde extérieur qu'il faut l'entendre, un sanctuaire au sein duquel les élèves les plus faibles peuvent malgré tout vivre leur enfance.

Dans la même interview, vous affirmez que l’État a fait d’énormes efforts, tout en voulant bien reconnaître « qu’il reste des enfants à la rue ». Cette concession repose sur un doux euphémisme, car aujourd’hui 7 octobre 2022 ce sont 174 enfants scolarisés qui se trouvent sans logement, sur la seule métropole lyonnaise. 174 enfants qui cet après-midi étaient en classe avec nos enfants, et qui cette nuit dormiront dehors. 

 

Alors Madame la Députée, pardon pour ce bourdonnement déplaisant.

 

Les membres du collectif « Jamais Sans Toit »